Ne rien attendre d’ithaque mais tout espérer du voyage, lui, le voyage, qui donne les connaissances et les richesses.
Retour à son pays d’origine, la mère patrie ou amère patrie ! Traversée de la mer; traversée de l’amer; traversée amère; Voyager les yeux fermés et imaginer son voyage, voyage d’images, voyage immobile d’images fuyantes.
Ithaque est le contraire de la Terre Promise. Ithaque, la promesse du voyage, sauf qu’Ithaque, épuisée et à bout de nerfs, n’a plus rien à donner. Ithaque est le point de départ et d’arrivée, terre désirée et terre maudite, sur laquelle un sort a été jeté. Ithaque n’est pas la Terre du retour. Ithaque est terre d’exil, la terre de l'homme errant sur sa propre terre, condamné à l’errance chez lui-même, errance sans fin. Ithaque, une terre dont on ne peut échapper mais que l’on tente toujours de fuir. Même en la fuyant, elle nous colle à la peau. Même en partant, on y reste toujours.
Le voyage à ithaque est aussi le voyage dans le labyrinthe, un voyage pour s’y perdre, pour ne jamais se retrouver, ou se retrouver serait s’y perdre à nouveau, un voyage plein de surprises, de dangers, de trappes et de pièges et de dragons : toutes ces religions, ces églises différentes, tous ces minarets, toutes ces identités multiples quoiques identiques qui s'entremêlent et se croisent, identités mal définies, indéfinies, indéfinissables, identités similaires, mêmes langues, mêmes mélanges de langues, parler pour ne rien dire, du haut de ces clochers et de ces minarets, un même appel à des guerres fratricides pour chasser l’ennui, pour oublier l'exiguïté du territoire, l’absence de buts, pour remplir d’horreurs l'innocuité de l'existence, le vide existentiel, remplir ce vide par des riens qui forment un tout.
©2022 Marwan Elkhoury